Article dans le bulletin municipal .
Depuis quelques jours et pour la durée des vacances ,de nouvelles familles ont déposé leurs valises ,au coeur de notre cité.
Castelvielh est un lieu où se rencontrent déjà la convivialité et le dynamisme ,les habitants chaleureux et engagés leur réserveront le meilleur accueil.
L’art de vivre qui fait le charme de notre commune les ravira .
Réjouissons-nous de leur choix et souhaitons-leur la Bienvenue !
Clotilde Balin.
Mamadou
Quelques jours ont passé. Chaque famille a accueilli du mieux qu’elle pouvait les candidats à un changement de vie radical et un voyage en terre inconnue.
La réunion de tous à la soirée avec buffet géant , musique et danse a été un franc succès et la Maire semblait heureuse et sincère de ce projet ambitieux voté par tous.
Cependant on sait bien que rien n’est simple. Les liens peuvent se tisser ou pas, la sympathie peut circuler ou pas . Les enfants sont vraiment le thermomètre d’une soirée. S’ils jouent, rient et sont heureux, l’ambiance est bonne, sinon…
Or, que se passe-t-il ? Il y a déjà la disparition de la fille de Stéphane. Déjà, des bruit courent sur ce jeune écrivain, Antoine Coustou qui fait un retour aux sources et veut créer une résidence d’artistes… La secrétaire de mairie a l’air d’en connaître un rayon sur sa famille et en particulier sur l’ arrière grand-père. Hum!ça sent déjà un peu le roussi. Déjà, les langues se délient, on ne sait pas trop de quoi il s’agit, mais ce n’est pas sympathique.
Je crois que le ire est la disparition de cette enfant. La police a été appelée en urgence. Il ne s’agit pas de traîner et de se retrouver devant un cadavre. Toute la joie de la soirée s’est volatilisée, il ne reste plus que de l’angoisse et de l’énervement. Tout le monde est sur les dents et s’est mobilisé. Il faut trouver cette enfant le plus vite possible. Un point , c’est tout.
Point de vue d’Anne Cristin à Madame Margot Bourdelet
Je m’interroge sur l’attitude de mes convives. Je suis très gênée par leurs disputes régulières où Léonore se montre très agressive et emploie des mots assez grossiers. Léontine et ses enfants sont très proches les uns des autres et parlent à tout le village. Léonore, au contraire, traverse le village sans saluer qui que ce soit se trouvant sur son passage. Elle part le matin tôt et disparait toute la journée.
Je ne sais pas analyser le problème et me demande si c’est une crise de couple ou un refus de vivre ici . De plus, les chiens n’ont aucune discipline et errent toute la journée en faisant courir des risques de morsure aux habitants ou aux troupeaux. Léontine m’a fait entendre qu’elle cherchait un autre endroit que notre village pour apaiser ce sujet de discorde avec Léonore. Je crains fort d’une défection de cette famille si nous ne proposons pas de projet d’installation. Peut-être pourriez vous la recevoir pour écouter leur situation et voir une possibilité de les convaincre de rester.
Nouvelle candidature
Cela faisait quelques jours déjà que j’errais dans les campagnes, j’évitais les villes, je n’approchais les villages que par nécessité, il fallait bien trouver à manger. Il y a deux jours je suis entrée dans la supérette d’un village dont j’ai oublié le nom, peu importe. Grâce aux quelques billets trouvés dans une boîte cachée dans le vestiaire des infirmières -une collecte, je crois, pour un cadeau de départ à la retraite- j’ai pu acheter de quoi me nourrir quelque temps… bon ok je n’ai pas tout payé mais le commerçant était distrait -il ne devait jamais avoir vu une rousse aux yeux verts- et il n’a pas remarqué que mes poches étaient bien gonflées. En sortant du magasin je remarque une vieille 4L verte, clef au contact, vraiment pas méfiant dans ce bled…et me voilà partie.
Après une nuit un peu fraîche, j’ai repris la route car cette fois je sais où je vais ! Le journal trouvé sur le siège arrière de la voiture n’était pas récent mais était très intéressant ; rien me concernant mais par contre cette annonce d’un village paumé qui cherche à se repeupler m’a tout d’abord intriguée et puis… Castelvielh… ce nom me dit quelque chose. J’ai cherché, fouillé dans ma pauvre mémoire et finalement je sais ce que je vais trouver à Castelvielh. Grâce à cette vieille carte Michelin rangée dans la boîte à gants, j’ai trouvé mon chemin et enfin le panneau d’entrée du village apparaît au détour un virage. Il était temps ma vieille guimbarde commençait à s’essouffler.
En route j’ai eu le temps d’échafauder mon plan, je vais aller directement voir cette Madame la Maire, je n’ai pas fait de lettre de candidature mais je vais bien trouver le moyen de l’embobiner mais il faudra la jouer fine !
Mon arrivée n’est pas passée inaperçue, je me suis garée sur la placette devant la mairie et j’ai pu remarquer les regards inquisiteurs de quelques mégères qui sortaient de l’épicerie : c’est peut-être mon accoutrement qui les dérangent. Il faut dire que j’ai pris un peu n’importe quoi dans le local des objets trouvés de ma « résidence » de Ville Evrard à savoir un sarouel multicolore, un pancho orange, une paire de crocs rose et surtout ma belle perruque rousse : c’est fou ce que les gens peuvent oublier !
Ca y est me voici dans le bureau cette madame comment déjà ? Viguier ? Oui c’est ça. Elle est là devant moi, elle me dévisage de la tête aux pieds avec un léger sourire… elle doit me trouver bien élégante ! Elle finit par me demander le pourquoi de ma visite, et là je me lance.
« Je m’appelle Ursula Trapanelle, je suis née au Brésil il y a 65 ans, où mes parents, originaires d’Auvergne, s’étaient installés et étaient propriétaires d’une fabrique de vêtements de carnaval qu’ils m’ont légués lorsqu’ils sont décédés d’un malheureux accident d’avion. Je suis donc rentière d’autant que j’ai également hérité de mon regretté parrain, ce cher tonton Christobal emporté par une longue maladie, comme on dit. Je suis à la recherche un endroit tranquille pour me reposer car je rentre d’un long voyage autour du monde, à bord d’un voilier, c’était merveilleux mais épuisant. J’ai lu votre annonce et j’ai été immédiatement conquise par ce projet. Evidemment j’ai demandé à mon fondé de pouvoirs de prendre quelques renseignements sur votre village et je crois savoir qu’il y a un vieux château qui aurait fortement besoin d’être restauré. »
Alors là, j’ai senti un grand intérêt pour ma petite histoire et je peux même dire que j’ai vu briller quelques étoiles dans ses yeux, qu’elle a de très jolis d’ailleurs. Elle m’a tout de suite annoncé qu’il y avait encore des familles d’accueil prêtes à recevoir des nouveaux venus et elle m’en a donné la liste. Je lui demande un instant pour en prendre connaissance et je finis par lui faire part de mon choix. Elle affiche un grand sourire et me demande de l’excuser prétextant un coup de fil urgent à passer dans le bureau d’à côté.
Les murs ont des oreilles surtout quand les miennes sont collées dessus. Je ne sais pas qui elle appelle mais pour sûr elle parle de moi : « Oui, une dame âgée de 65 ans, qui s’est présentée spontanément à la mairie et souhaite venir s’installer au calme dans notre région. J’ai compris qu’elle était mère célibataire d’un fils d’une cinquantaine d’année, certes cela ne va pas relever les effectifs de notre école mais je t’assure son arrivée peut être intéressante pour notre commune. Bon, elle me semble un peu extravagante mais sa situation financière pourrait être une grande chance pour notre village, elle m’a déjà parlé du château à rénover, ce qui serait un atout pour attirer quelques touristes. »
Après encore quelques mots, elle raccroche, je retourne vite sur ma chaise. Elle entre dans le bureau et m’annonce qu’elle peut me présenter tout de suite à la famille si je le souhaite.
Eh bien, allons-y ! Ha, ha, cette fois j’en suis sûre : je l’ai jouer fine !
A la sortie du village nous arrivons devant un petit atelier. De chaque côté de la porte sont accrochées des poteries de toutes les couleurs dans lesquelles sont posées des bouquets de fleurs séchées. C’est charmant ! A l’intérieur les potiers sont affairés, l’un sur son tour et l’autre à la décoration. Tout de suite ils s’interrompent et viennent à notre rencontre, madame la maire fait les présentations : «Ursula je vous présente Jean et Pauline, ce sont nos artistes ». Ils s’avancent vers moi tout sourire et me tapent la bise spontanément. Je n’ai pas l’habitude des toutes ces effusions mais je fais bonne figure.
Ha ! Jean et Pauline… je sens que l’on va bien s’entendre !
SKIPPY
Quel bonheur de respirer l’air de la campagne, d’entendre des gazouillis d’oiseaux, de me rouler dans de l’herbe épaisse et fraîche !!
Je ne sais où promener ma truffe tant il y a d’odeurs nouvelles.
Je cartographie tout, et relève les caractéristiques de chacun de mes congénères afin de mieux les approcher lorsque je les rencontrerai.
C’est que je ne suis pas une femelle facile moi ! Je ne me laisse pas renifler le derrière par n’importe quel bâtard du coin !
Quoique… il y en a un qui a suscité chez moi une érection du poil dorsal dès son approche, non par crainte, mais par émotion. J’ai redressé la tête, les oreilles bien droites, levé la queue et l’ai actionnée pour l’inviter à la rencontre.
Que de sensations lorsqu’il a approché sa truffe de mon…de ma carte d’identité !!
Nous nous sommes tourné autour histoire de nous apprivoiser, et sommes partis ensemble gambader dans les prés.
Il faut dire que c’est un sacré canon : un grand noir robuste au poil luisant, à l’allure fière et racée. Hector, viens là que je te dévore !!!
Il m’a fait découvrir le secteur, parcourir les recoins de chaque ruelle, les murs de chaque maison : le village n’a plus de secret pour moi.
Je me sens tellement bien avec lui.
Il m’a confié son inquiétude vis à vis des enfants qui sont venus chez lui le temps des vacances, et particulièrement de la petite Gabriella.
La gamine a peur de lui ! J’espère que ce n’est pas parce qu’il est noir ! Ce serait un comble : elle est noire aussi !!
Lui, il s’en fout de sa couleur de peau, il a apprécié de lui faire une grosse léchouille
bien baveuse. Il fait la même chose avec ses sœurs Rose et Méline. Pour lui, tous les enfants sont sympas et à croquer, dans le bon sens du terme.
Je lui ai conseillé de s’approcher d’elle en douceur, de poser délicatement sa tête sur ses genoux et de la regarder avec tendresse. Si, de surcroît, il associe tout ça avec un petit couinement plaintif, elle devrait fondre la gamine !!
En plus, cette pauvre gosse, craint de faire peur aux villageois comme elle a fait peur aux petites de la famille parce qu’elle est noire.
Je me dis que si elle arrive au village accompagnée d’ Hector, ça l’aiderait à faire connaissance puisqu’il la rassurerait.
A toi de jouer mon bel Hector, (m’)amadoue moi tout ça !
Noir c’est noir, il y a plein d’espoir !!
C. F.
Récit du retour de Julia
tel que l’a raconté maintes fois Mamadou
avec mille digressions différentes.
Le cinquième matin, je suis parti avec impatience à l’assaut du château qui me nargue depuis le premier jour.j’ai suivi un sentier incertain, mal entretenu, disparaissant souvent sous les broussailles, mais il m’a semblé qu’il avait été emprunté récemment. Je fixe l’entretien du sentier comme priorité, au programme de mon chantier de restauration… mais rapidement mon esprit s’égare dans le souvenir des chevaliers errants de mes lectures de jeunesse.
Alors que je commençais à progresser entre les murs délabrés des enceintes, j’ai été arrêté par une volée de cailloux et un violent : « Fous le camp blanc-bec ! Sinon, je te saigne à blanc ! »
J’ai découvert un freluquet boutonneux d’une vingtaine d’année, perché sur un muret de l’ancien donjon. Ne pas répondre à l’insulte. Suivant le fil de mes pensées premières, je lui ai rétorqué : « Holà, Seigneur des Broussailles, auriez vous perdu le sens de l’hospitalité envers les chevaliers errants qui ne cherchent qu’une juste cause à défendre.Prenez garde à ce que je ne m’en offusque ! »
Le jeune homme en est resté coi. Ses mains chargées de pierres en sont tombées, tandis qu’une chevelure dorée, puis des yeux écarquillés émergeaient au dessus du lierre.Le jeune homme a semblé furieux. Quant à moi, j’avais tout de suite reconnu la jeune fille que l’on cherchait partout depuis le premier soir et dont le portrait avait circulé. J’ai profité de mon avantage.
« Oh, belle et gente Dame, seriez vous l’hôtesse ou bien la captive de ce soudard malotru ! »
Et j’ai poursuivi le jeu sur le même registre jusqu’à ce que les barrières tombent et qu’ils m’acceptent sur leur campement derrière le muret : un abri de fortune bien précaire et un espace dégagé , nettoyé, au milieu duquel un maigre feu était contenu entre des pierres. A côté , une récolte de champignons qui m’a fait bondir :
« je ne m’y connais pas encore bien en matière de champignons, mais voici deux amanites phalloïdes et trois amanites tue -mouche ; elles ont jolies mais si vous n’avez pas l’intention de mourir, mieux vaut ne as y goûter. »
j’ai sorti de mon sac à dos un sandwich au chèvre et à la confiture de châtaigne que je m’étais préparé et le leur ai partagé. Je leur ai indiqué un ancien verger plein de pommes que j’avais repéré en montant et je les ai laissés. Il a fallu que je jure de ne rien dire au village : « croix de bois, croix de fer, si je meurs je vais en enfer !»
Bien entendu, dès mon retour à la ferme, j’ai tout raconté à Irine ; on a retrouvé Bastien et Cyril pour mettre au point une stratégie. Cyril, qui est particulièrement posé s’est chargé de prévenir Stéphane chez Nadia et aussi l’infirmière, Camille Costella, car, à ma description, il avait bien reconnu dans le jeune homme son fils Mathieu, le « branleur « du village. Il n’a pas donné de détail. Il a bataillé pour obtenir qu’ils ne changent rien à leur comportement, surtout ne tentent rien de leur côté. Ils devaient seulement laisser un accès libre à leur maison, attendre patiemment, nous faire confiance.
La nuit de cette fin d’octobre était claire mais froide. Bastien nous a conduit par un chemin escarpé, connu de lui seul jusqu’au pied du rempart. Nous nous sommes écartés et nous avons remué les buissons, interrompant nos bruitages de longs moments de silence. Le son se propage vite, à travers les pierres vers ceux qui dorment à même le sol. De paroles indistinctes sont descendues du campement. Bastien, qui est expert en la matière, a ponctué notre concert végétal du hululement d’une chouette, plus tard de cris de corbeaux et de grognements de sangliers. Ça commençait à remuer franchement dans le donjon. Alors il a enchaîné : des hurlements de loups, d’abord lointains, étouffés, puis de plus en plus présents avant de faire retomber le silence.
Cinq minutes plus tard, c’était la débandade. Les jeunes ont dévalé le sentier en faisant rouler les pierres Au village, ils se sont séparés, sans un mot, et n’ont même pas été étonnés de trouver les fenêtres de leur chambre entrouvertes. Ils se sont effondrés dans leur lit, sans trouver pour autant le sommeil.
Pendant ce temps, à la ferme, on a beaucoup ri autour d’un vin chaud et d’une bonne flambée.