La mécanique se met en place
Pour Ursula le temps presse.
Toute la nuit j’ai repensé aux révélations de Marie-Ange. Je n’avais donc pas rêvé ni eu d’hallucinations : j’ai eu un enfant, pourquoi tout le monde a voulu me le cacher ? A cause de cette prétendue folie ? Quand je repense à cette pauvre vieille, je l’ai bien secouée quand même, j’espère qu’elle ne va pas aller se plaindre auprès de la Mairesse. Celle-là, elle fait un grand détour dès qu’elle m’aperçoit, je pense qu’elle regrette de m’avoir acceptée si vite. D’ailleurs, elle n’est pas la seule, j’ai l’impression que tout le village m’évite ou m’espionne, jusqu’aux animaux comme ce sale rat et le chat enragé qui regardaient par la fenêtre de Marie-Ange hier soir, ils ont déguerpi à toutes pattes dès que je suis sortie de la maison. Mais peu importe il faut que je reste focus sur mon objectif et que tout cela se termine rapidement car l’article du journal risque d’éveiller quelques soupçons, heureusement il n’y avait pas de photo mais dans un prochain article, qui sait ?
Je décidai de partir faire un tour dans le village. Jean et Pauline étaient déjà affairés dans leur atelier. Je mis la tête par la porte entr’ouverte pour leur souhaiter le bonjour. Jean m’accueillit avec un grand sourire comme à son habitude mais Pauline était plus distante, je passais outre et finis d’entrer. Sans détour je leur ai demandé où je pourrais trouver Laurent. Pauline me regarda l’air surpris : Laurent Marty ? Dit-elle. Jeanl répondit : pourquoi tu en connais beaucoup des Laurent dans le coin ? Je l’interrompis vivement : oui, oui, c’est cela Laurent Marty, je dois aller lui rendre visite et Jean m’indiqua leur adresse sous le regard réprobateur de sa femme. Sans plus attendre je me mis en chemin.
En m’approchant de la maison je vis deux petits anges en train de jouer dans la cour, un garçonnet tout blond et une fillette. « Bonjour les enfants !» lançais-je avec un grand sourire. Les deux petits me regardèrent et vinrent en sautillant jusqu’au portail. Eux, au moins, je ne leur fais pas peur, tant mieux ils sont si jolis ces petits cœurs ! « Bonjour Madame, je m’appelle Léo, je joue avec ma copine, elle c’est Héloïse et toi t’es qui ? ». Je franchis le portail, m’assis par terre et entamai une discussion avec les enfants. J’appris ainsi que Léo était le fils de Laurent. Oh quelle joie ! Je suis donc grand-mère. Mais soudain une voix féminine nous interrompit « Les enfants, où êtes-vous ? ». Une femme femme apparut, surprise de me voir. Elle paraissait toutefois sympathique et pas du tout effrayée. Je m’excusais pour mon intrusion en prétextant une fatigue soudaine, elle m’invita à prendre un café, ce que j’acceptai vivement en la remerciant.
Elle se présenta : « Je suis Nadia, la maman de Léo. Vous savez, ce n’est pas souvent que nous avons de la visite, Laurent, mon époux est absent toute la journée pour son travail et comme moi je travaille à domicile je vois très peu de monde et j’avoue que cela me manque. Je ne vous avais pas encore vue dans le village pourtant il y a quelque chose en vous qui m’est familier. Peut-être dans les yeux, vous avez le même regard vert que Laurent ».
Et oui, ma petite, rien d’étonnant à cela ! Après une courte conversation, je pris congé. Sur le chemin du retour j’aperçus encore ces sales bestioles fouineuses qui guettaient mon passage. Elles ne me lâcheront jamais celles-là ! Ah vivement la fête de samedi, je sais maintenant que Laurent et sa famille y viendront.
Moi aussi je serais là !
***
SOLANGE à une amie.
Moi qui croyais que la vie à la campagne était calme, je me suis mis le doigt dans l’oeil jusqu’au coude !
Que d’effervescence !
Je suppose que la venue de personnes étrangères au village à tout bouleversé.
De nouvelles têtes, ça fait jaser. Les vieux de la vieille scrutent les faits et gestes des uns et des autres. Ah là, pas besoin d’alarme ou de caméra de sécurité : le panneau « voisins vigilants » tient toutes ses promesses!!
Tout se sait…ou presque !
La dernière nouvelle qui circule, ce serait la véritable identité de cette Ursula.
Il y a dans le journal régional la photo d’une femme qui lui ressemble beaucoup, même si la couleur de cheveux est différente.
Cette femme se serait échappée d’un asile psychiatrique en blessant une infirmière.
J’ai bien sûr fait le rapprochement avec le sang découvert dans la voiture d’Ursula.
Et toute son attitude trahit un désordre mental inquiétant.
J’aime bien ce village et j’aimerai y rester, mais les événements des derniers jours m’inquiètent un peu…
Notre période d’essais touche à sa fin et nous allons devoir tous faire le bilan de cette expérience particulière afin de déterminer qui reste, et qui part.
Une grande fête est en cours de préparation pour la fin de notre séjour, et les enfants, qui ont fini par se découvrir et s’apprécier, préparent un spectacle.
Ima, (tu sais, c’est la mère de Gabriella, la gamine qui avait peur des chiens), m’a demandé de garder ses filles pendant qu’elle va à la ressourcerie avec Julia (la gamine qui avait fugué). Ah ben oui, quand je te dis que ça bouge ici !!
Elles sont adorables ses filles, et d’une gaieté sans nom.
Nous avons passé l’après midi à chanter et à danser. Elles m’ont appris une de leurs danses africaines. Elles se sont bien moquées de moi en me voyant essayer de me trémousser comme elles au son des percussions avec soupleté et agilesse !!
Qu’elles sont belles lorsqu’elles sourient : la blancheur de leurs dents et les étincelles dans leurs yeux ont illuminé mon après midi !
Voilà le topo des dernières nouvelles.
Tu vois, je ne m’ennuie pas !
Ce serait génial que tu puisses venir pour me donner ton avis.
Je te bizouille
Solange
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